Belleville est une légende vivante au coeur de Paris. Quartier bohème, cosmopolite et arty, c’est un village ultra-vivant loin des sentiers battus. Du lourd, de l'immuable ! Le Paris d’aujourd’hui, d’hier et de demain ! Mais pourtant Belleville change, se “boboïse”, se “gentrifie” ! Est-ce grave docteur ? Belleville, “ville monde” symbole de mixité est-elle vraiment en train de muter en “hipster city”, de perdre son supplément d’âme et (accessoirement) de devenir inabordable ? De quel Belleville parle-t-on d’ailleurs ? On part à l’enquête.
Fiche d’identité
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Délimitation : "notre Belleville à nous", c'est en gros un triangle sur 4 bouts d’arrondissements avec le boulevard de Belleville comme colonne vertébrale :
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du square Juliette Dodu derrière l’hôpital St Louis (10ème) par la rue Saint-Maur jusqu’à la rue Oberkampf (côté 11ème),
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puis en remontant sur la rue de Ménilmontant (côté 20ème) et sur le Haut Belleville jusque la rue des Pyrénées,
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enfin en passant par le métro Pyrénées, délaissant Jourdain, pour redescendre vers le boulevard de Belleville avec la butte Bergeyre (19ème) à droite
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Ambiance : gouailleuse, mélangée, dynamique, attachante... terriblement humaine quoi !
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Habitants : de toutes les couleurs et de tous horizons
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Architecture et prix M² : un grand mix architectural autour de 8500 €/m², mais 10 000 €/m² déjà pour des biens de qualité
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Accessibilité : excellente. Pas moins de 8 stations et 3 lignes de métro (M2, M3, M11) qui vous amènent au centre de Paris en un éclair
Choisir Belleville quand on a un projet d'achat d'appartement à Paris, c’est avant tout privilégier une ambiance unique, intense et calme à la fois où il fait bon sortir le soir, se balader le week-end ou tout simplement vivre. Terre d’accueil de tant d’origines, de cultures, d’artistes, l’histoire de Belleville explique tout de son identité solaire, foutraque, libertaire et contagieusement heureuse (on vous conseille ce tumblr WTF Belleville en guise d'amuse bouche !)
Belleville, terre de renaissances
L’histoire de Belleville se conjugue en effet au futur et au passé lointain. On mentionne la présence tranquille d’habitants sur la colline de Savies dès l’époque des mérovingiens, attirés sur ces hauteurs par la présence précieuse de sources d’eau (plus que par la vue à l’époque on imagine !). Un siècle plus tard, ce sont les grands travaux de Napoléon III et du préfet Haussmann - de 1852 à 1870 - qui eurent pour effet de chasser du centre un grand nombre d'artisans et d'ouvriers, bien souvent futurs communards. Beaucoup s’installèrent alors sur les terres de Belleville tout en travaillant dans les usines toutes proches ou dans les nombreux ateliers artisanaux. C’est ainsi que s’est développée une culture syndicale intense, dont la maison des métallos ou la Bellevilloise (aujourd’hui centres culturels et cafés) ou la myriade d’associations aujourd'hui sont l’héritage.
Au XXe siècle, le quartier est un lieu de refuge pour les vagues successives d'immigration : après la 1ère guerre mondiale, ce sont les polonais, arméniens et juifs d'Europe centrale (ashkénazes) qui déboulent à Belleville. Dans les années 50, d’autres vagues de migrants juifs tunisiens font de Belleville le premier quartier juif de Paris. Puis dans les années 60, après la guerre d’Algérie, les communautés magrébines s’implantent massivement dans le quartier, suivies par la communauté asiatique, tout particulièrement chinoise.
Mais la grande spécificité de Belleville, c’est son brassage culturel heureux. Même si la communauté asiatique réside encore aujourd’hui essentiellement dans le bas de Belleville (comme nombre d'Antillais et d'immigrés d'Afrique subsaharienne) tandis que les hauts de Belleville sont davantage composés de bobos blancs à tendance bio, ici, il n’y pas de quartier chinois, juif ou maghrébin. Toutes les communautés vivent mélangées, au gré des vagues migratoires, et partagent les lieux avec la vieille génération des prolétaires français et les jeunes familles qui débarquent en masse. La mixité étant génétique dans ce quartier, l’un des plus métissé de France, l’Etranger ne fait donc plus peur. C’est d’ailleurs ici que le front national fait ses plus bas scores à Paris et en France !
A la découverte des pépites du bas Belleville
Démarrons la ballade immobilière par le nord du quartier.
Depuis le square Juliette Dodu en passant par la jolie rue colorée Sainte Marthe, sa place et ses restaurants. Plus bas, nous voilà dans le bas Belleville, surnommé astucieusement Babelville par la sérieuse (mais déjantée) ANPU(Agence nationale de Psychanalyse Urbaine). On y trouve une foultitude de restaurants ou d'épiceries chinoises et vietnamiennes, africaines, marocaines, tunisiennes, des boucheries halal et casher, qui se côtoient dans un savoureux mélange de saveurs et de parfums. Vive la mondialisation culinaire !
Ici, beaucoup de choses se concentrent autour de la rue de la fontaine aux rois qui relie le faubourg du temple au boulevard Belleville, de la rue Saint Maur et de la fameuse rue Jean Pierre Timbaud (plus fameuse encore depuis le livre témoignage alerte et rapeux de Geraldine Smith en 2016 sur une dérive communautariste dans le quartier).
Il faut dire qu'on est à deux pas d’Oberkampf. C’est un lieu d’effervescence et de la branchitude : épiceries fines et concept stores le jour, bars survoltés ou restaurants tendances la nuit.
Moralité, si vous cherchez à acheter un appartement, cherchez en retrait de la rue et méfiez-vous du bar en rez-de-chaussée ! Le tapage nocturne, ça peut user même la génération Y ! Même le maire du XIème s'en mêle dans le Parisien et veut « installer la cohabitation entre les commerçants de la nuit, les fêtards et la légitime attente des riverains à vouloir dormir tranquille ».
Pour les plus exigeants, il est encore possible de trouver des lofts ou des petites maisons dans les recoins de cette partie populaire de Belleville, mais c'est rare à la vente et très demandé. Qui ne s'imagine pas heureux propriétaire d'un bien de charme dans la cité du Figuier en retrait de la rue Oberkampf ! Sinon, pour un appartement ancien plus classique, comptez plutôt autour de 8 500-9000€/m² par exemple autour du square Jules Verne qui apporte un peu de verdure à cet espace dense d'habitations.
De Babelville à Belleville Hills
Traversons maintenant le boulevard de Belleville,
Autour des réputés cafés Zorba ou Aux Folies, dans la rue de Belleville, de Tourtille ou plus bas vers Ménilmontant entre les marcheuses, c’est une myriade de cantines (dont la fameuse Cantine de Belleville), d'épiceries exotiques, de restaurants asiatiques ou de bouis-bouis sans prétention mais furieusement bons qui concourent tous à la battle du meilleur bobun de Paris .
Même le “Food Market“, évènement bi-hebdo de "street food" est un carton local et draine les gourmets détendus depuis quelques années entre les métros Couronnes et Belleville.
Tout ce quartier sous le parc de Belleville est agréable, authentique et plus calme. Beaucoup d'artistes y résident alentours, comme dans la rue Ramponneau et s'y cachent avec délice. Ne ratez sous aucun prétexte la rue Dénoyez, (ex) haut lieu des graffeurs et des fresques colorées, entre terrasses de bars.
Montons la butte en l'attaquant par le parc de Belleville ou en feintant par la rue Piat. A "Belleville Hills", comme le scandent les tee-shirts de No/one portés en étendard par les stars ou autres habitants fiers de leur quartier, on a l'impression de marcher sur un toit de Paris. Les rues sont étroites, l'espace se découpe en volumes, rues et ruelles, espaces verts et jeux de lumière. A 130 mètre au-dessus de la Seine, la vue est après l’effort, doublement à couper le souffle ! Après un brunch un dimanche midi ou un verre lors d'une soirée ensoleillée en terrasse du Bistro Moncoeur, vous risquez d'aimer Belleville à jamais ! La vue s'étend sur tous les quartiers parisiens, sur la tour Eiffel, l'Opéra et l'on aperçoit Montmartre à l'horizon vers le Nord.
Tout autour, des appartements ou des ateliers d’artiste se nichent. Il faut savoir les chercher et être patient car l’endroit est très prisé.
En poursuivant la découverte vers la rue de Pyrénées et la Bellevilloise plus bas à Ménilmontant, vous serez surpris par le côté village assoupi unique de la rue des cascades. Ici, il fut un temps où les cascades, les mares, les rivières et les rigoles, les puits et les fontaines se trouvaient à tous les coins de rues. D'ailleurs, on dirait qu'il s'est arrêté !
Pour Audrey, "home catcher" chez Je Rêve d'une Maison, attention pépites dans ce coin ! « Allez voir du côté de la rue et la cité de l'Emitage. C'est un ilot verdoyant, une ancienne cité ouvrière avec des jolis jardins secrets et des mignonnes maisons de ville. Trop chouette ! »
Continuons la ballade en laissant au loin les grands immeubles de logements sociaux sous le parc de Belleville entre la rue des Couronnes et de Ménilmontant. On atteint alors par la rue des Pyrénées le métro et le quartier Jourdain. Ici, autour de l’église Saint-Jean-Baptiste édifiée en style gothique en 1859, nous ne sommes plus tout à fait à Belleville. C'est un quartier un peu moins populaire déjà, plus bobo diront certains, où l'on découvre aussi au cours des flâneries immobilières de mignons ateliers d’artistes dans des cours cachées ou ouverts sur des jardins fleuris. Pas complètement un hasard peut-être si les bonnes toques se donnent aussi rendez-vous sur ce haut de butte bellevilloise au Mensae, un des derniers la vague gastro néo-bistrot qui déferle sur l'est parisien.
Redescendons de la butte via l'avenue Simon Bolivar en laissant à droite l'autre "butte cachée de Paris", la sublime butte Bergeyre. Elle a un des plus beaux panoramas de Paris sur Montmartre et le Sacré-Cœur, et des appartements très rares particulièrement agréables à vivre. Mais c'est une autre histoire !
Bobo à Belleville et même pas mal !
Plus que jamais, Belleville reste cet incroyable espace créatif pour artistes de tout genre. Cela vient de loin : lieu de naissance d’Edith Piaf, Belleville, c’est aussi toute la poésie des faubourgs parisiens d’antan. Les photographes humanistes comme Doisneau, Izis ou Willy Ronis ne s’y sont pas trompés en en faisant leur terrain de jeu favori pour immortaliser le Paris populaire. Si vous aimez Daniel Pennac, vous avez sûrement découvert Belleville à travers la saga des Malaussène. La ville y est si présente qu’elle devient un personnage en elle-même.
Il suffit d’arpenter le pavé bellevillois pour se rendre compte à quel point l’art est partout, même dans la rue. Malgré la bataille perdue fin 2016 des artistes graffeurs de la rue Denoyez qui va désormais accueillir une crêche et des logements sociaux, le street art de continuer à fleurir partout dans le quartier. Nemo et ses pochoirs poétiques, Kouka et ses guerriers ou encore Jérome Mesnager, avec ses corps blancs, ont tous marqué de leur empreinte les rues du coin. Sur la place Fréhel, deux grands murs impressionnants se font face : l’un est signé Ben et l’autre Jean Le Gac.
Belleville, quartier d'artistes et de bouillonnement créatif n'est donc pas un mythe. Poussez jusqu'aux Ateliers d'Artistes de Belleville, rue Francis Picabia, ou attendez une de ces journées portes ouvertes pour découvrir comment ces 250 créateurs infusent la vie artistique dans ces lieux.
Alors bien sûr, cela bouge, comme partout à Paris. La gentrification avance, et les batailles de collectifs se succèdent. Dernière en date : la réorientation de la mairie de Paris, sous la pression des riverains depuis 2 ans, d'un projet immobilier initialement commercial en un beau concept de pôle artisanal, laissant aussi en activité la métallerie Gressilon installée depuis 1947 au fond de cette jolie cour pavée du 48 de la rue Ramponneau.
A la manoeuvre, la Semaest, société d'économie mixte de la ville de Paris de dynamisation de quartier ne ménage pas ses efforts... pour le meilleur pour certains et pour le pire pour d'autres. En excerçant ses droits de préemption lors de ventes, notamment de locaux commerciaux, elle mène par exemple des programmes depuis 2004 comme Vital'quartiers pour dynamiser le commerce de proximité en rénovant puis en louant à prix raisonnable des espaces à des (souvent jeunes) entrepreneurs. Dernier programme en date, les connected stores pour accompagner les commerçants dans la mutation numérique.
Autre exemple de transformation en cours, la Miroiterie à Ménilmontant, récemment reprise par la Bellevilloise, n'a pas fini de faire parler les pros et anti gentrification. Il faut dire que cet ancien squat alternatif, lieu de concerts et de vie artistique locale pendant 15 ans, doit être réhabilité sous peu. Projet équilibré (une résidence étudiante, un hammam et des lofts artistiques) entre commerce et culture pour certains, "moche" et "bourgeois" pour d'autres, rien n'est jamais simple ici. Et en attendant la reconstruction, va pour des friches de la Miroiterie, avec cabanes en bois, plantes diverses et graviers pour accueillir des mini bals et happening culturels ! On maîtrise bien ses classiques !
Alors, faut-il avoir vraiment peur des bobos à Belleville ? Certes, l'ouverture récente d'un Séphora au métro Belleville a "traumatisé" certains journalistes et locaux, alors que ce n'est qu'une évolution logique d'une marque vers son public plus jeune et multiculturel. Certes, chacun peut imaginer le pire arriver : l'inflation de l'immobilier mais plus grave de la bouchée vapeur, du tofu ou de la baguette.
Mais au délà des discours, a-t-on vraiment vu débouler ici d'autres nouveaux habitants que des jeunes diplômés de la classe moyenne payés 2000€ qui démarrent dans la vie ou des jeunes familles aventureuses et "Belleville compatibles" ? Car ne va pas à Belleville "n'importe qui" ! Belleville semble solide, avec cet esprit libertaire et autogestionnaire qui souffle encore quelque part dans le quartier.
Alors parions que, même embarqués dans un cycle boboïsant à souhait, les bobos "gentrifieurs" de Belleville seront les plus populaires et les plus sympas de tous les bobos du monde ! Et que Belleville restera Belleville (en mieux) pendant encore un bon moment. Mais dépêchez-vous quand même si vous voulez acheter car Belleville, c'est trop bien !
Enfin, c'est juste notre avis, et vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas !
Eric Chatry
Cofondateur de Je Rêve d'une Maison, Eric est passionné d'immobilier et d'innovation avec une vision centrée autour des problématiques des acquéreurs.